Le réseau de la santé et des services sociaux se mobilise pour prévenir une crise des opioïdes au Québec

 

En entrevue avec Info Opioïdes, Julie Rousseau, directrice du développement, de l’adaptation et de l’intégration sociale et responsable de la Stratégie de prévention des surdoses d’opioïdes à la Direction générale de Santé publique (DGSP) du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS), a expliqué les travaux en cours qui serviront à prévenir une crise des opioïdes ou à bien la gérer si elle survient.

La DGSP travaille étroitement avec plusieurs directions du MSSS, notamment la Direction générale des Services sociaux. Un comité multisectoriel a aussi invité des organismes gouvernementaux et non-gouvernementaux à collaborer au développement de la Stratégie et à déterminer particulièrement les actions à mettre de l’avant advenant une crise. Le comité est composé de représentants de Centres intégrés de santé et de services sociaux, du Bureau du coroner, du ministère de la Sécurité publique, du Collège des médecins, de l’Ordre des pharmaciens, de regroupements d’usagers et d’organismes communautaires. Des rencontres ont eu lieu au printemps 2017. Pendant la période estivale, les membres seront invités à valider les mesures inscrites à la Stratégie en élaboration et à se préparer à les mettre en œuvre dans leur secteur d’activités respectif. La Stratégie de prévention des surdoses d’opioïdes appuiera le prochain plan interministériel en dépendance et la Politique de prévention en santé. Elle sera davantage centrée sur des activités à réaliser à court terme.

Quelle est la leçon principale à tirer de l’expérience de la Colombie-Britannique en proie actuellement à une grave crise des opioïdes? « La prévention », insiste madame Rousseau. « Nous avons eu des échanges avec la Colombie-Britannique et savons que nous devons nous positionner fortement au niveau de la prévention. »

Bref, le nerf de la guerre est d’obtenir un meilleur profil des consommateurs d’opioïdes et de leurs comportements, de les informer adéquatement et de bien suivre l’évolution de la situation. Une attention doit être accordée à toutes les catégories d’usagers, que ce soit au niveau de l’usage d’opioïdes consommés de façon illicite ou pour un traitement médical. « En Colombie-Britannique, les consommateurs qui font un usage de drogues en dehors de traitements médicaux demeurent réfractaires aux nombreux messages de prévention. Leur dépendance les place passablement à risque de surdoses. Il faut en savoir plus sur ces utilisateurs, incluant les utilisateurs occasionnels », fait remarquer la responsable de la Stratégie.

La Stratégie de prévention des surdoses sur les opioïdes du Ministère comportera différents volets qui s’arrimeront avec les programmes de traitement de la dépendance déjà en place dans le réseau. Un des volets, la vigie et la surveillance, est développé en collaboration avec l’Institut national de santé publique du Québec. Il s’agit de mettre au point des indicateurs qui s’ajouteront à ceux que le réseau utilise déjà, mais qui renforceront sa capacité à détecter rapidement toute anomalie survenant dans le contexte habituel de consommation et de surdoses au Québec. Ces indicateurs permettront de recueillir des informations pointues et en temps opportun pour fournir un portrait précis de la situation.

Heureusement, selon madame Rousseau, le Québec bénéficie de facteurs de protection géographiques et socioculturels. « Historiquement, la consommation de cocaïne a dominé au Québec. Jusqu’à tout récemment, il y avait une moins grande consommation d’opioïdes au Québec comparativement à ce qui se vit ailleurs au Canada. L’arrivée du fentanyl  [sur le marché illicite] est un événement relativement récent. Néanmoins, puisque nous ne connaissons pas précisément les facteurs qui expliquent la situation différentielle vécue au Québec, nous nous devons d’élaborer et de mettre en place les mesures nous permettant de prévenir et de gérer une crise éventuelle ». 

Qu’en est-il de la réalité d’une ville ou d’une région à l’autre et du clivage urbain-rural? Bien que la majorité des surdoses survenues au Québec aient eu lieu à Montréal et à Québec, la Stratégie tiendra compte des besoins partout dans la province. Les mesures envisagées seront adaptées pour être ensuite déployées dans chacune des régions sociosanitaires.

Référence : Info Opioïdes, Programme Cran, Direction santé mentale et dépendance, Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux du Centre-Sud-de-l'Île-de-Montréal, juillet 2017