Info-Opioïdes Juillet 2017

Une nouvelle loi protège les personnes qui portent secours aux victimes de surdose

La Loi sur les bons samaritains secourant les victimes de surdose est entrée en vigueur le 4 mai 2017 dans le cadre de la lutte contre la crise des opioïdes au pays. Elle a pour but d'encourager le témoin d'une surdose à rapporter l'urgence en composant le 911. En effet, un témoin peut craindre d'être accusé de possession de drogue ou d'une autre infraction criminelle s'il appelle le 911. Pour savoir comment la Loi peut protéger les témoins, suivez ce lien.  

L'importance de faire le 911 après l'administration de naloxone 

Un bulletin du Réseau communautaire canadien d’épidémiologie des toxicomanies (RCCET) rappelle qu’il faut composer le 911 après l’administration de naloxone pour deux raisons cruciales :

  • L’élément actif consommé peut être plus puissant qu’on ne le croit en raison du contenu inconnu des drogues de rue. Celles-ci peuvent avoir été coupées avec du fentanyl, du carfentanyl ou d’autres produits contrefaits qui peuvent être dangereux. La durée d’action de ces drogues étant par le fait même inconnue, il est impossible de prévoir la quantité de naloxone nécessaire pour renverser les effets d’une surdose. Pour assurer la sécurité de la personne qui vient de faire une surdose, rappelons qu'il y a un urgent besoin de l'entourer d’expertise et de surveillance médicale.
  • La naloxone agit pendant environ 30 à 60 minutes, mais ses effets commencent à se dissiper au bout de 20 minutes. Certains opioïdes ayant une durée d’action plus longue que celle de la naloxone, il est donc possible que la personne retombe en état de surdose. Celle-ci doit être placée rapidement sous observation par des professionnels de la santé qui interviendront si les symptômes de surdose (détresse respiratoire, lèvres bleues, palpitations cardiaques,hyperthermie, etc.) réapparaissent.

Selon des données du RCCET pour la période de 2013 à 2016, les personnes formées pour administrer de la naloxone, qui n’étaient ni premiers répondants ou professionnels de la santé et qui avaient traité une surdose avec de la naloxone, n’ont pas composé le 911 dans 30 % à 65 % des incidents. Pour un peu plus d’un tiers des répondants, la principale raison était la crainte d’une intervention policière et d’une possible arrestation. Deuxième raison invoquée : les répondants croyaient que la personne s’en remettrait toute seule. 1

1  Réseau communautaire canadien d’épidémiologie des toxicomanies et Centre canadien de lutte contre les toxicomanies, Bulletin du RCCET,  mars 2017, page 1.

La Suboxone n’est plus un médicament d’exception


 

Bonne nouvelle pour les personnes dépendantes des opioïdes qui sont réfractaires au traitement à la méthadone : la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ) a annoncé le transfert de la Suboxone MC, médicament d’exception, dans la section régulière de la Liste de médicaments. Entrée en vigueur le 1er juin 2017, cette modification permet dorénavant le remboursement sans code ou autorisation préalable de la SuboxoneMC par la RAMQ.

Consultez l'infolettre de la RAMQ.

Une vidéo sur la technique d’administration de naloxone injectable

Réalisée par les pairs-aidants de l’association d’usagers Méta d’Âme en collaboration avec le Cran, cette vidéo est destinée aux personnes qui pourraient être témoin d’une surdose par quelqu'un qui consomme des opioïdes, que ce soit de l’héroïne de rue ou des médicaments opioïdes pour soulager la douleur chronique. Enregistrée dans le cadre des ateliers de formation du projet PROFAN (Prévenir et réduire les overdoses – Former et accéder à la naloxone), cette vidéo s'adresse aux usagers, à leurs proches et à leur entourage. On peut la visionner à https://youtu.be/ec4BT2Sss3s. Nous vous invitons à informer vos patients de ce précieux outil qui donne des conseils pouvant littéralement sauver des vies.

Collège des médecins du Québec : bientôt un guide d’exercice sur la douleur aiguë

La dépendance aux opioïdes est un problème complexe qui nécessite plusieurs solutions.  Pour prévenir la dépendance aux opioïdes à la suite d’un traitement de la douleur, le Collège des médecins du Québec (CMQ) prépare un guide d’exercice pour aider les médecins à éviter que le traitement de la douleur aiguë ne se transforme en traitement chronique.

Ce nouvel outil servira à l’enseignement aux résidents et aux étudiants en médecine.  Le guide sera publié en 2018. Selon le Dr Yves Robert, secrétaire du CMQ, il faut associer le traitement à la douleur réelle que ressent le patient plutôt qu’«appliquer une recette». « Après une opération, la douleur est plus aiguë dans la première semaine, mais diminue par la suite. Il n’y a aucune raison de ne pas adapter la médication.»2

2  Ariane Lacoursière, «Dépendance aux opioïdes : des outils pour sensibiliser les médecins»,  La Presse, le 8 avril 2017, p. A5

Le Cran forme le personnel des services d’injection supervisée à Montréal

Le 19 juin 2017, trois sites offrant des services d’injection supervisée (SIS), dont un mobile, ont finalement vu le jour à Montréal. Un quatrième ouvrira en septembre. Ces nouveaux services de santé sont assurés par des équipes de professionnels constituées d’infirmiers, d’intervenants communautaires et de pairs-aidants et offrent un accueil et un soutien adapté aux personnes souhaitant les utiliser. Une telle synergie interdisciplinaire permettra certainement d’améliorer la qualité de vie des personnes faisant usage de drogues par injection.

Deux médecins du programme Cran se sont investies dans la planification, la formation des cliniciens et l’organisation de l’offre médicale des services d’injection supervisée. Les Dres Marie-Ève Goyer et Anne-Sophie Thommeret soutiennent les équipes afin d’offrir un service de qualité aux personnes qui en feront usage. En outre, plusieurs médecins du Cran s’apprêtent à assurer une couverture médicale des SIS à Montréal.

Dans la préparation des cohortes de professionnels, le programme Cran a également dispensé une formation sur l’importance d’offrir des services adaptés aux besoins des populations visées. Au programme : l’organisation structurelle des Services bas seuil Relais du programme Cran et l’appropriation du traitement de la dépendance aux opioïdes et des enjeux cliniques que comporte ce type de service. La formation a été rendue possible grâce à l’implication d’Élaine Polflit, cheffe d’équipe des Services Relais, de Marie-Ève Goyer, coordonnatrice médicale de Relais, et de Karine Hudon, conseillère clinique par intérim au programme Cran.

Le réseau de la santé et des services sociaux se mobilise pour prévenir une crise des opioïdes au Québec

En entrevue avec Info Opioïdes, Julie Rousseau, directrice du développement, de l’adaptation et de l’intégration sociale et responsable de la Stratégie de prévention des surdoses d’opioïdes à la Direction générale de Santé publique (DGSP) du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS), a expliqué les travaux en cours qui serviront à prévenir une crise des opioïdes ou à bien la gérer si elle survient.

La DGSP travaille étroitement avec plusieurs directions du MSSS, notamment la Direction générale des Services sociaux. Un comité multisectoriel a aussi invité des organismes gouvernementaux et non-gouvernementaux à collaborer au développement de la Stratégie et à déterminer particulièrement les actions à mettre de l’avant advenant une crise. Le comité est composé de représentants de Centres intégrés de santé et de services sociaux, du Bureau du coroner, du ministère de la Sécurité publique, du Collège des médecins, de l’Ordre des pharmaciens, de regroupements d’usagers et d’organismes communautaires. Des rencontres ont eu lieu au printemps 2017. Pendant la période estivale, les membres seront invités à valider les mesures inscrites à la Stratégie en élaboration et à se préparer à les mettre en œuvre dans leur secteur d’activités respectif. La Stratégie de prévention des surdoses d’opioïdes appuiera le prochain plan interministériel en dépendance et la Politique de prévention en santé. Elle sera davantage centrée sur des activités à réaliser à court terme.

Quelle est la leçon principale à tirer de l’expérience de la Colombie-Britannique en proie actuellement à une grave crise des opioïdes? « La prévention », insiste madame Rousseau. « Nous avons eu des échanges avec la Colombie-Britannique et savons que nous devons nous positionner fortement au niveau de la prévention. »

Bref, le nerf de la guerre est d’obtenir un meilleur profil des consommateurs d’opioïdes et de leurs comportements, de les informer adéquatement et de bien suivre l’évolution de la situation. Une attention doit être accordée à toutes les catégories d’usagers, que ce soit au niveau de l’usage d’opioïdes consommés de façon illicite ou pour un traitement médical. « En Colombie-Britannique, les consommateurs qui font un usage de drogues en dehors de traitements médicaux demeurent réfractaires aux nombreux messages de prévention. Leur dépendance les place passablement à risque de surdoses. Il faut en savoir plus sur ces utilisateurs, incluant les utilisateurs occasionnels », fait remarquer la responsable de la Stratégie.

La Stratégie de prévention des surdoses sur les opioïdes du Ministère comportera différents volets qui s’arrimeront avec les programmes de traitement de la dépendance déjà en place dans le réseau. Un des volets, la vigie et la surveillance, est développé en collaboration avec l’Institut national de santé publique du Québec. Il s’agit de mettre au point des indicateurs qui s’ajouteront à ceux que le réseau utilise déjà, mais qui renforceront sa capacité à détecter rapidement toute anomalie survenant dans le contexte habituel de consommation et de surdoses au Québec. Ces indicateurs permettront de recueillir des informations pointues et en temps opportun pour fournir un portrait précis de la situation.

Heureusement, selon madame Rousseau, le Québec bénéficie de facteurs de protection géographiques et socioculturels. « Historiquement, la consommation de cocaïne a dominé au Québec. Jusqu’à tout récemment, il y avait une moins grande consommation d’opioïdes au Québec comparativement à ce qui se vit ailleurs au Canada. L’arrivée du fentanyl  [sur le marché illicite] est un événement relativement récent. Néanmoins, puisque nous ne connaissons pas précisément les facteurs qui expliquent la situation différentielle vécue au Québec, nous nous devons d’élaborer et de mettre en place les mesures nous permettant de prévenir et de gérer une crise éventuelle ». 

Qu’en est-il de la réalité d’une ville ou d’une région à l’autre et du clivage urbain-rural? Bien que la majorité des surdoses survenues au Québec aient eu lieu à Montréal et à Québec, la Stratégie tiendra compte des besoins partout dans la province. Les mesures envisagées seront adaptées pour être ensuite déployées dans chacune des régions sociosanitaires.

Référence : Info Opioïdes, Programme Cran, Direction santé mentale et dépendance, Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux du Centre-Sud-de-l'Île-de-Montréal, juillet 2017

Le Cran fête ses 30 ans et se regroupe au CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal

Le 31 mars dernier, le Cran est devenu le programme Cran de la Direction des programmes de santé mentale et dépendance du CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal (CIUSSS-CCSMTL).

Le 26 avril, à la veille de son 30e anniversaire et en présence de nombreux partenaires institutionnels et communautaires assemblés pour l’occasion, le Cran a souligné son regroupement volontaire avec le CIUSSS-CCSMTL après un parcours remarquable pendant lequel il a travaillé sans relâche à la reconnaissance, à l’accessibilité et à l’avancement des traitements de la dépendance aux opioïdes (TDO) au Québec.

Fondé en 1986, en pleine crise du sida à Montréal et de pénurie de médecins prescripteurs de méthadone, le Cran est rapidement devenu un chef de file en matière de TDO. Le regroupement a pour but d’assurer la pérennité de sa mission en qualité de centre d’expertise en TDO et la bonification des services aux usagers dans un continuum intégré de services.

Une synergie importante résultera du regroupement en raison des vocations complémentaires du Cran et du CIUSSS-CCSMTL qui travaillaient déjà conjointement à la poursuite de leurs mandats cliniques, d’enseignement et de recherche. Pour les clientèles du Cran, la prestation des services demeure fluide puisqu’elle continue d’être assurée par les mêmes professionnels de la santé qui travaillent aux deux points de service du Cran,  les Services réguliers, au 110, rue Prince-Arthur ouest, et les Services bas seuil Relais, au 1015, rue Sainte-Catherine est.

Le clou de la soirée aura été le témoignage de Marie Gagnon, usagère des services du Cran et auteure de plusieurs ouvrages publiés portant sur l’expérience de la dépendance. Madame Gagnon a galvanisé l’auditoire en relatant les étapes d’une vie rendue douloureuse par la consommation d’héroïne. Elle a décrit les bienfaits du traitement de la dépendance qui lui ont permis de retrouver une qualité de vie et de se dédier à sa passion, l’écriture. Au Dr Pierre Lauzon, médecin fondateur du Cran, qui était présent, elle a adressé toute sa gratitude d’être en vie et de donner une voix aux usagers. Un message authentique et éloquent qui a déclenché un tonnerre d’applaudissements de la part des médecins, chercheurs, gestionnaires, infirmiers et intervenants psychosociaux qui étaient dans la salle.

Le programme Cran poursuit donc son travail pour diffuser les meilleures pratiques, faire avancer les pratiques émergentes et améliorer l’accès aux services de traitement de la dépendance aux opioïdes. Cette mission est d’autant plus cruciale que le Québec s’emploie à prévenir une crise des opioïdes sur son territoire pour éviter ce que l’ouest du pays vit actuellement.  

Vous pouvez consulter le communiqué sur le regroupement du Cran au CIUSSS-CCSMTL

PHOTO DU HAUT : Madame Sylvie Des Roches, directrice générale du Cran, reçoit un magnifique bouquet de fleurs, entourée des représentants du CIUSSS-CCSMTL suivants : madame Micheline Ulrich, présidente du C.A., madame Sonia Bélanger, présidente-directrice générale,  monsieur Jean-Marc Potvin, président-directeur adjoint, et madame Bonita Laau, directrice, Direction des programmes Santé mentale et Dépendance.

Événements

 

 

 

 

 

 

Deuxième symposium sur la prise en charge médicale de la dépendance au Québec, le 10 novembre 2017, à l’Hôtel Marriott Château Champlain, à Montréal.  L’événement présentera un volet sur le traitement des troubles liés à l’utilisation des opioïdes. Pour plus d’information

Congrès Questions de substance 2017, du 13 au 15 novembre, à Calgary, organisé par le Centre canadien de lutte contre les toxicomanies (Canadian Centre on Substance Abuse). Pour consulter le programme et s’inscrire

L’Association des intervenants en dépendance du Québec (AIDQ) et l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR) organisent le Forum provincial portant sur les enjeux et les pistes de solution visant la mise en place d’actions intersectorielles auprès des personnes judiciarisées qui consomment des drogues et qui sont atteintes ou à risque de contracter des ITSS. Cet événement aura lieu le vendredi 27 octobre 2017, à l’UQTR. Pour plus d'information

Rédaction : Ivanka Stewart-Patterson
Mise en page: Sarah Poulin-Chartrand
Merci à nos contributeurs : David Barbeau, Marie-Ève Goyer, Karine Hudon

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